Télétravail : accords et vigilances

La phase expérimentale de mise en œuvre du télétravail va être prochainement lancée à l’Agence Erasmus+ France / Education Formation. Cette organisation particulière du travail où l’activité professionnelle est exercée en partie à distance grâce aux technologies de l’information et de la communication séduit de plus en plus.

Le télétravail pour supporter les maux du quotidien

En France, près d’un tiers de salariés travaille régulièrement hors des murs de leur entreprise. Et leur nombre devrait augmenter compte-tenu de l’évolution des villes, de nos modes de vie et de travail : augmentation des prix du logement dans les centres-villes qui poussent les salariés à habiter de plus en plus loin de leur lieu de travail, augmentation du prix du carburant qui renchérit le coût des déplacements, saturation des transports en commun aux heures de pointe, nuisances sonores dans l’open space… D’ailleurs, limiter le temps perdu dans les trajets quotidiens et travailler au calme afin de renouer paisiblement avec sa capacité de concentration constituent les deux principaux motifs poussant les personnels à demander à leur hiérarchie à passer au moins une journée par semaine en télétravail.

Esquiver la frénésie des heures de pointe, se décharger du poids de cette course quotidienne contre la montre que subit nombre de parents (déposer les enfants à l’heure à l’école, les récupérer à l’heure chez la nounou le soir) et travailler au calme ne serait-ce qu’une journée par semaine, n’est plus une chimère grâce au télétravail. C’est pourquoi les salariés plébiscitent ce mode d’organisation du travail qui contribue indéniablement à réduire fatigue et stress.

Lire l’interview d’un télétravailleur : « Ma journée en télétravail : moins de stress et moins de fatigue »

Les entreprises, de leur côté, constatent les effets bénéfiques du télétravail sur leurs salariés, les cadres – qui représentent plus de la moitié des télétravailleurs –  comme les autres employés : la confiance et l’autonomie, fondements indispensables du télétravail, participent à une meilleure productivité du collaborateur et contribuent à faire baisser le taux d’absentéisme. Tout irait donc pour le mieux dans le monde du télétravail ? Le télétravail serait-il la panacée à nos maux du quotidien ?

Risques d’isolement et de confusion entre vie privée et vie professionnelle

Le télétravail n’est pas sans risque pour le salarié, le principal étant l’isolement. Etre éloigné du bureau, même si ce n’est qu’un jour ou deux par semaine, peut avoir des conséquences pesantes en matière de vie sociale professionnelle. Au-delà du fait que le télétravailleur peut passer à côté d’informations, il peut aussi manquer des moments de convivialité, ce qui peut, à la longue, contribuer à son isolement. N’oublions pas que nous, humains, sommes des êtres sociaux…

Travailler chez soi peut aussi accentuer la brouille des limites entre vie privée et vie professionnelle. Alors que tout se joue dans un même espace, le logement personnel, il est parfois difficile de savoir quand commence le travail et quand il finit, ou de donner sa juste place à la vie privée et familiale. Etablir des horaires précis des temps de travail quotidien semble indispensable, comme bien maîtriser le droit à la déconnexion. Car même si l’on travaille chez soi, nul ne peut être présent à tout. C’est la raison pour laquelle certaines entreprises refusent d’accorder l’autorisation de télétravail le mercredi aux mères de familles. Garder ses enfants ou travailler : il faut choisir…

Une organisation du travail privilégiant le management par objectifs et l’autocontrôle

Pourtant, nombreux sont les télétravailleurs qui ne reviendraient en arrière pour rien au monde. Les bénéfices de cette journée de travail à domicile compensent largement à leurs yeux ses inconvénients. Et même si les télétravailleurs font le constat qu’ils consacrent plus de temps à leur travail lorsqu’ils sont chez eux, même s’ils constatent une augmentation de certaines charges (chauffage, électricité), ils continuent de défendre leur journée hebdomadaire de télétravail.

Peut-être parce que le télétravail modifie leur relation à leur hiérarchie. Lors d’une situation de télétravail, la hiérarchie est moins présente physiquement et les relations sont supposées être fondées sur la confiance et non le contrôle. Pour cela, l’organisation du travail met l’accent sur la fixation d’objectifs et une liste d’activités « télétravaillables » est définie. Les télétravailleurs sont alors autonomes tout en devant produire les résultats attendus… Cette contrainte les pousse très souvent à développer d’eux-mêmes des formes d’autocontrôle pour prouver leurs réalisations.

Une vigilance de rigueur soulignée par les organisations syndicales

Le télétravail est une forme de travail qui ne se soustrait pas à une vigilance nécessaire en matière de protection des salariés. Aussi, FO demande une négociation interprofessionnelle sur le télétravail pour dépasser les accords de branches et ainsi rédiger un texte « ressource » applicable à plusieurs branches professionnelles.

Sans remettre en question la nécessité d’un accord interprofessionnel, le SNEFIE FO soutient la mise en place du télétravail à l’agence en ce qu’il permet aux salariés de diminuer stress et fatigue imputables aux transports quotidiens et aux nuisances de l’open space et en ce qu’il permet à des salariés autonomes et rigoureux de mieux vivre leur travail par une meilleure conciliation de leur vie privée et professionnelle.

Le SNEFIE FO reste néanmoins vigilant sur le risque accru de confusion entre des temps de vie et des horaires de travail plus longs observés chez les télétravailleurs réguliers (+ 35mn/jour en moyenne) ; et sur les conséquences de l’isolement induit par le télétravail – même lorsque celui-ci est appliqué un jour par semaine : diminution de la vie sociale et accroissement du risque de dépression ; ralentissement de l’évolution des carrières dû à l’invisibilisation des télétravailleurs.

Il rappelle que le télétravail va de pair avec le droit à la déconnexion et demande à ce que toute convention de télétravail inclut une information en matière de droit à la déconnexion.

Il s’oppose à la mise en place de bureaux « tournants » ou partagés sous couvert de mise en place du télétravail pour pallier au manque criant d’espace dans les bureaux (1 an seulement après le déménagement dans les nouveaux locaux).

Ressources :

Etudes de la DARES – novembre 2019 : https://dares.travail-emploi.gouv.fr/dares-etudes-et-statistiques/etudes-et-syntheses/dares-analyses-dares-indicateurs-dares-resultats/article/quels-sont-les-salaries-concernes-par-le-teletravail

Communiqué de FO sur la nécessité d’une négociation interprofessionnelle : https://www.force-ouvriere.fr/IMG/pdf/cp_-_fo_-_le_rapport_de_la_dares_sur_le_teletravail_confirme_la_necessite_d_une_negociation_interprofessionnelle_.pdf

Droit à la déconnexion : https://www.force-ouvriere.fr/IMG/pdf/droit_a_la_deconnexion.pdf

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